"J'en ai vu passer des humains et des civilisations et je suis toujours là". Regarder le monde à l'ombre d'un mégalithe, ça change toute la vision.
La plupart des villes médiévales avaient ces petites cellules sur les ponts, aux angles de rues ou accolées aux églises. Les recluses veillaient en tant que sentinelles spirituelles. Leurs prières se dirigeaient vers les morts et les vivants, pour la fertilité des terres, pour la protection de la cité , pour repousser les épidémies et les envahisseurs. On venait les consulter pour des conseils et des bénédictions. En tant que rempart spirituel, elles renforçaient les emparts physiques des villes. Elles étaient parfois accolées aux églises, comme à Saint-Irénée de Lyon ou aux cimetières (cimetière des Innocents). On en connaît à Montpellier, Aurillac, Toulouse, Paris, Venise, Cologne, Bruges, Londres, Valladolid. Morte au monde, la recluse pénétrait dans sa cellule avant qu’on ne la scelle. La cérémonie d’enfermement comprenait l’extrême-onction et un requiem, devenant «morte au monde». Ce privilège convoité, à l’instar des ermitages des moines, était un summum de piété et de sacrifice.
On connaît Alix la Burgotte, qui passa 46 ans en bordure de l’église des Saints-Innocents et y mourut le 29 juin 1466. En 1485, Renée de Vendomois, qui fit assassiner son mari, fut condamnée à être recluse et emmurée au cimetière des Saints-innocents. Le reclusoir de Saint-Wandrille, celui de Sainte-Colette à l’église de Corbie, celui de Jeanne de Cambry à l’église Saint-André de Lille, celui de Saint-Flour sont les plus connus.
Ma préférée, si l’on peut dire, est la recluserie de Saint-Flour, située sur le Pont-Vieux enjambant l’Ander, où la recluse était vénérée. Le reclusage de Sainte-Christine trouva toujours des volontaires, peut-être dès le milieu du XIe siècle. Une « maison de la Recluse » fut édifiée sur le pont par la municipalité au XIIè siècle. Il fallait être de Saint-Flour pour être admis au reclusage. A la Renaissance, passé de mode, le phénomène s’arrêta. Beaucoup furent détruites lors des guerres de Religion, dont à Saint-Flour, où la fête de saint Christine est toujours un événement ajuourd’hui. Le nom de la ville, auparavant Indiciac, remonte à la venue de Florus, réputé l’un des 72 disciples du Christ. Arrivé au bas du plateau, il apposa sa main sur un rocher qui s’ouvrit, lui laissant le passage. Il construisit une chapelle à un endroit délimité dans la neige par Dieu, d’où il évangélisa la région.
Sources : msn.com ; Alix du cimetière des Innocents ; Reclusoir ; Recluserie de Saint-Flour ; partir-ici ; saint Flour Florus; vpah